Coronavirus : les frères capucins du couvent de Crest fauchés par le mal
Par Gérard Méjean et Solenn de RoyerPublié aujourd’hui à 00h52, mis à jour à 11h54Lecture 10 min.
Nul ne sait comment le Covid-19 s’est introduit dans ce couvent de la vallée de la Drôme. Onze religieux y vivaient. Ils ne sont plus que six aujourd’hui.
Ils sont coupés du monde. Plus personne, ou presque, n’emprunte le chemin, bordé de forsythias et de lauriers-tins, qui mène chez les capucins. Au pied des hauts murs de galets, mangés par le lierre, des boules de buis ont été plantées, et aussi quelques rosiers. Installé à l’ouest de la ville de Crest, dans la vallée de la Drôme, ce couvent du XVIIe siècle, à la façade sobre et austère, est revêtu d’un crépi gris. A gauche de l’entrée, un imposant crucifix en bois comme seul ornement. Et partout, le silence.
Sous la voûte voisine de la chapelle, un panneau présente au visiteur les capucins de la maison. Il y a encore deux semaines, onze portraits figuraient derrière la vitre plastifiée. Il n’y en a plus que six. Les photos des frères Pierre, Emmanuel, Armand, Marcel et un autre Pierre, emportés ces derniers jours par l’épidémie, ont été retirées et placées dans la chapelle, où prient les capucins cinq fois par jour, de laudes à complies.
Personne ne sait comment le virus est entré ici. Avant même que les premiers symptômes n’aient été diagnostiqués, les frères avaient commencé à se plier aux consignes sanitaires : gestes barrières et désinfection des surfaces à l’eau de Javel. Cela n’a pas suffi. Les uns après les autres, parfois plusieurs en même temps, ils sont tombés malades. Certains s’en sont remis, d’autres non.
Frère Emmanuel, 94 ans, s’est éteint le premier, le 25 mars. Ordonné prêtre le 10 mars 1951, cet homme originaire de Taulignan, dans le sud de la Drôme, vivait depuis quinze ans au couvent de Crest, qui accueille des frères âgés. Secret, Emmanuel Fabre se dévoilait peu devant ses frères. Cet homme solide et pragmatique s’épanouissait davantage dans la vie pastorale, à Clermont-Ferrand, où il vécut longtemps, ou à Angers. « Il était toujours partant pour une mission », raconte frère Lucas, le « gardien » (responsable) du couvent
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